La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

jeudi 17 juin 2010






Le cairn de Jacques...






Depuis une semaine le temps ne connait pas d'accalmie et le vent souffle tellement fort qu'il m'oblige à me réfugier, loin des côtes. Je me dirige donc plein sud, pour rejoindre un endroit où j'ai tourné mon premier documentaire sur le land art, en 2002." Portrait d'artiste ".
J'ai beaucoup travaillé sur les rives de l'Orne, ce petit fleuve côtier qui arrose la ville de Caen. L'endroit choisi, aujourd'hui est sur la rive gauche qui borde un grand déversoir amenant l'eau jusqu'à un ancien moulin. Cet hiver, l'eau recouvrait les berges et je n'aurai pu y travailler. Maintenant que le niveau est plus bas, je dispose de quelques mètres carrés de plat pour y élever un cairn dédié à mon frère Jacques. Le problème se trouve dans l'accès de ce site. Une pente artificielle à quarante cinq degrés, sans végétation, rend le terrain dangereux et glissant. En cas de chute, c'est l'arrivée, vingt mètres plus bas sur un matelas de roches, puis, dans le lit de fleuve, de quoi faire une bonne sieste !
Je descend la côte en biais, comme on fait en montagne.J'atteins le méplat sans trop de mal, et j'évalue la quantité de pierres dont je disposerai, suffisante, pour me lancer dans mon travail. Quelques grosses pierres ont dévalé la pente, et certaines se sont arrêtées avant l'eau, mais ce n'est pas assez pour bâtir la base et je dois en retirer quelques unes du fleuve et aller en chercher d'autres à un dizaine de mètres de là, de part et d'autre du site. Une partie de la base sera dans l'eau ce qui me gênera un peu pour tourner autour du cairn en le construisant, mais je ne peux faire autrement. Lorsque celui-ci a atteint un mètre de haut, je procède au rituel habituel qui consiste à le " lier " au paysage. Je cueille quelques feuilles d'érable et les dépose au cœur du cairn avant de les recouvrir de pierres et de continuer mon travail. Je procède pratiquement toujours, ainsi, pour que pierres et végétaux s'acceptent.. Il ne ferait pas bon de tomber à l'eau , ici, car le courant est très puissant. Je ne peux m'empêcher d'avoir un pensée pour les victimes des inondations du Var. C'est vrai la Nature, est autre chose que les jolies fleurs et les petits oiseaux. Il faut y vivre à longueur d'années pour comprendre ce qu'il y a d'éprouvant à le faire. C'est pour moi, aussi, dans la pratique du land art, " in situ", une manière de me sentir vivant. Ici, nous ne connaissons pas de chaleurs extrêmes comme j'ai pu les connaitre dans le sud Marocain, bâtissant des cairns, sous une chaleur harassante de cinquante degrés, dans la région de Tafraout, et même, dans le sud sud Tunisien, en pleine montagne désertique de Matmata. Avoir vécu ces expériences m'avait rapproché des populations vivant et travaillant sous des cieux, certes bleus, mais éprouvés par la chaleur et le manque d'eau.
J'aime bien, ici, retrouver cette compagnie de l'eau et je dois dire que ce cairn isolé, a fière allure, érigé en gardien du fleuve. Hormis le vandalisme, il pourrait rester en place ici, au moins jusqu'aux prochaines crues. Mais, pour moi, une fois terminé, ce cairn ne m'appartient plus, il fait partie du lieu, du paysage et je dois le quitter pour qu'il vive sa vie. Ainsi, lorsque je circule dans la région, me reviennent par bribes,des souvenirs d'installations réalisées, ici et là. Il ne me reste que ça et quelques photos. C'est bien dans la pratique journalière et dans rien d'autre que je veux inscrire ma trace éphémère, sans attaches à ce que j'ai créé, sans regrets de ce qui va disparaître, acceptant la loi naturelle de l'entropie comme un phénomène inéluctable. Carpe diem.


Roger Dautais









Admiration




J'ai été devant les maisons de la ville
Et j'ai dit C'est admirable
J'ai été devant les roues et les machines
Et j'ai dit, C'est admirable
Et j'ai été devant les monts immobiles
Et j'ai dit C'est admirable
J'ai été devant les mers bleues les mers vertes
Et j'ai dit C'est admirable
J'ai été devant les arbres des forêts
Et j'ai dit, C'est admirable
Et j'ai été devant les grosses bêtes
Et j'ai dit, C'est admirable
Et j'ai été devant les petites bêtes
Et j'ai dit, C'est admirable
Et j'ai été devant les femmes
Et j'ai dit, C'est admirable
J'ai été devant l'ombre
Et j'ai dit, c'est admirable
Et devant la lumière
Et j'ai dit, C'est admirable

Parce que j'ai regardé.

Pierre Albert-Birot
(1876-1967)



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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.