La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mardi 19 février 2013






Breizh
L'adieu au renard

Direction
Petite spirale au corps  mort
Les forces vives : pour Guy Allix
Survivre au nombre  : pour Audrey

Tourner la page :  à Louis Bertholom
Exil :  Pour Patrick Lucas
Cairn aux coquelicots: pour Ana Mendieta
La répétition : Pour Katelen
Paroles rouges : Pour Marie-Josée Christien
L'été comme  il va : pour Salomé Guadalupe
Le soleil de Joshua : pour Marty
Mandala :  pour Marie-Claude
Juste avant la nuit : Pour Erin
Alliance :  pour Denise Scaramai
Neuf raisons  pour changer d'âge :  pour Bob Bushell

BLOG EN PAUSE



L'adieu aux sables...
C'est  au fleuve que je laisse  le soin de m'amener jusqu'à elle : la mer. La mer que je sais être  là, quittant l'estuaire  pour quelques heures, mais présente derrière les dunes d'oyats que je vais franchir,  une  à une. C'est, aujourd'hui, une journée  particulière,  un adieu écrit dans les sables,  à ce pays d'emprunt,  où j'ai vécu  presque trente ans, sans être autre chose qu'un étranger :  un horsain. Ainsi  nous appelait-on,  lorsque nous sommes arrivés de Bretagne. Mais je ne regrette rien au  moment de quitter cette terre.
Il fait beau,  pour une fois, comme une trêve dans ce long hiver gris et pluvieux. Le souvenirs défilent, liés  à ce paysage où je cherchais une solution à cette solitude imposée. Les gisants, les cairns, les étoiles, les carrés d'été, les marches interminables, les jours de tempête, les chutes, les blessures parfois, la laisse de mer et ces bois flottés qui furent mes prétextes  à vivre mieux.
Pour commencer la marche,  j'élève deux petits cairns en offrande aux lieux, puis je reprends  mon chemin. J'aperçois, à quelques dizaines de  mètres, une forme animale, couchée sur la grève. C'est  un  jeune renard mort déposé  par la marée  haute.Je décide de  lui donner une sépulture et, ne pouvant creuser le sol, trop compact, je le recouvre de bois flottés que j’entoure d'un cercle de sable. Sans ce dernier geste, je ne partirai  pas tranquille. Je quitte la zone marécageuse et  j'arrive sur la grande  plage qui borde la rive droite du fleuve. Je décide de tracer  une petite spirale autour d'un tronc d'arbre,  histoire de me mettre en jambes et je la prolonge d'une flèche  donnant la direction de la marche  à suivre. Quelques centaines de  mètre plus loin, je recommence  l'exercice autour d'un magnifique tronc d'arbre blanchis  par l’eau de mer , qui sera certainement repris  à marée  haute et déplacé d'endroit.
Mon objectif est d'atteindre le  plus important des bancs de sable de l'estuaire. Lorsque j'arrive sur les lieux, je suis  seul. Imaginez ce banc de sable s'étirant sur  400mètres de long et une centaine de  mètres de  large, légèrement en forme de dôme, éclairé  par  un soleil généreux pour la saison. La mer est calme, pas très loin de moi. Vers  l'Est, j'aperçois, Le Havre, Trouville, et  plus proche, Houlgate. Vers  l'Ouest, le port de Ouistreham. Un Ferry embarque une kyrielle de poids  lourds en partance  pour l'Angleterre.
L'endroit est idéal  pour tracer une dernière spirale avant notre départ. Le sable est souple, débarrassé de ses pierres qui  m'avaient gênées  il  y a quelques semaines. Ici, dans l'estuaire, marqué par de forts courants, la mer fait le  ménage, déplace les bancs de sable, remue les pierres, les emporte  ou les déposes selon son humeur.
Je plante mon talon  gauche dans le sable, conscient de le faire  ici,  pour la dernière fois. Le sable se  fait agréable, complice, amical, comme s'il  comprenait.. La spirale se déroule parfaitement car je maîtrise bien le geste. Bien sûr,  je souffre des jambes et du dos  car  l’exercice reste très  physique, surtout  à 70 ans passés, mais je tiens  à réussir  au mieux cette dernière spirale et jusqu'au bout,  je m'applique dans sa réalisation.
Lorsque je me redresse, pour la contempler, inscrite dans ce paysage sauvage,  à vingt mètres de la mer, bien présente, encore  pour quelques heures sur ce dôme, je me dis que j'ai atteint  mon  objectif. Elle sera le trait d'union entre la Normandie que nous quittons bientôt et la Bretagne  où nous partons vivre avec Marie-Claude. Et je décide aussitôt d'appeler cette spirale : Breizh (Bretagne). Le soleil décline et sa lumière rasante est parfaite pour faire ressortir les ombres et lumières de cette spirale de 45 mètres de circonférence.
Je prends quelques  photos puis je pars, sans me retourner. Dans quelques heures,  la mer  l'aura recouverte entièrement et ce sera bien ainsi. Une dernière fois,  j'aurai donné le meilleur de  moi-même et fait  pour le mieux. "Elle" fera le reste.
Sur le chemin du retour, je pense  à celle que j'aime et qui prépare avec moi, le retour au pays.

Roger Dautais 

                                  BLOG EN PAUSE

Cette pause   va me permettre, de faire le  point, de reprendre des forces et de  préparer ce changement de région. Si tout va bien, je le reprendrai dans le courant du printemps prochain, avec des créations nouvelles  à vous présenter.
Je remercie les 110600 lecteurs qui m'ont rendu visite jusque là. Vous pouvez déposer des commentaires si vous le désirez, je les lirai avec  un  grand  plaisir et j'y répondrai également. Je ne vous oublierai pas, ayant bien l'intention de vous visiter sur vos blogs respectifs.
Permettez_ moi de reprendre des textes de deux  poètes  et amis qui  me sont proches pour de multiples raison et dont la poésie m'aide  à vivre. Il s'agit de Marie-Josée Christien et de Guy Allix que je remercie  sincèrement.




Je presse le pas
vers l'oubli
qui ne s'éteint pas

Jusqu'à l'épuisement
je passe mon chemin

Je m'absente
à son indifférence.


Marie-Josée Christien 2011


***


Je m'exile du vertige
et retourne au silence
d'où je viens
hors d'atteinte
de la griffure des mots

je m'absente
à son indifférence

en cercle hors d'atteinte.

Marie-Josée Christien 2011


mariejoséechristien.monsite-orange.fr/poesie / index.htl



Effraction

1
Il s'en faut toujours de peu

Mais venir  jusqu'à terre
Là  où le fleuve s'insurge
Où la lave s’apprête
2
N'écrire ne vivre
Que dans l'effraction

Là est la seule demeure...
Passagère
3
Tu ne seras que  là-bas
A terme
Dans ce dépôt de toi
Jeté sur l'horizon

Dans l'espace de ce dedans
Qui  n'ose le présent

Dans l'espace de ce magma lourd
Qui  t'affole et  crispe

Et te rend à ton silence.

Guy Allix

SURVIVRE ET  MOURIR  -
 ROUGERIE mars 2011

 http://www.recoursaupoeme.fr/po%C3%A8tes/guy-allix

samedi 9 février 2013

La tendresse des pierres
Le guetteur noir
Cairn du vent
Cairn des brisants
Dialogue

Énergie orientée
La marche vers la mer
Exil
Méridienne

Globules rouges
Croire  à la vie
Silhouette
Ensemencer  l'hiver


La tendresse des pierres...



 L'hiver est long. Je ne suis pas sorti depuis une semaine, faisant avec une santé moyenne et un moral  du même  acabit qui accompagne le tout. Sentant mes forces revenir, je décide de rejoindre la  côte pour les tester et les mettre  à l'épreuve. Il fait froid et humide avec  un 2° au-dessus de zéro. Je traverse la plaine au  nord de Caen. Elle borde le littoral et s'élève doucement jusqu'à découvrir  un  large paysage marin qui s'étend au Nord -Est jusqu’au Havre, situé  à 60 kilomètres et sur le Nord-Ouest, la suite de la Côte de Nacre et ses villages les pieds dans le sable. Lorsque j'arrive sur la plage choisie, un vent du nord glacial me saisit. Pour un retour au métier, c'est un bon retour tonique. Dès que je mets le pied dans le sable, je trace une petite spirale dont le but est  de mobiliser mon énergie pour la suite de la journée. Il fait trop froid  pour continuer à créer. J'entreprends de marcher, marcher,  jusqu'à ce que je me réchauffe. Je commence par remonter vers l'Est.La plage est immense et vide. Aucune âme en  peine sur cette grève que la mer vient de quitter  il  y a deux heures  à peine. Le sable s'essuie par les petites rigoles d'eau de mer qu'il retient et  lâche,  on dirait,  à regrets. A vrai dire, je pense surtout au froid et aucune idée d'installation ne me vient d'emblée. Le soleil fait quelques apparitions entre les très beaux nuages qui tapissent le ciel tout en épargnant l'horizon. Le paysage est  grandiose et j'y suis bien malgré le froid. Un sentiment de liberté nait en moi,  à chaque fois que je marche dans ces immensités de sable. J'oblique vers la mer et marche encore un bon quart d’heure avant de retourner vers ces masses sombres aperçues tout  à  l'heure au niveau de l'estran. J'arrive dans un champ de pierres,  plutôt  petites mais qui  me donne immédiatement envie d'élever quelques cairns.C'est alors que je découvre des morceaux de fer  rouillés, sortant du sol, sur lesquels se sont  collés de petits coquillages. Étranges formes qui  peuvent se transformer  en redoutables pièges  pour les baigneurs  à marée haute. Impossible de les arracher  ni de les ébranler. Je devine que sous le sable, elles font partie d'objets métalliques assez grands. Des vestiges de la guerre ? Je ne sais pas. Nous sommes ici sur les plages du Débarquement  du 6 Juin 1944 en Normandie, secteur Anglais de  Gold Beach. 25000 Anglais  y débarquèrent et perdirent 113 hommes le Jour J. Comment l'oublier?
J'ai  à ma disposition, ces ferrailles jaillies du sol et des  pierres.C'est peu et suffisant  à la fois. L'équilibre de la grosse  pierre de base sur ces ferrailles  me demande du  temps et de la patience. Je travaille  à genoux pour avoir plus de précision dans le geste.
Cela se joue au millimètre près et il est facile de comprendre que le reste du cairn doit progresser pierre par pierre, toutes posées avec délicatesse. Je réalise ainsi cet ensemble que j'appelle : dialogue, car je l'imagine bien  naître entre ces deux cairns perchés. Et  puis les autres vont suivre, de plus grande taille avec des pierres nettement plus lourdes que je dois manipuler avec précaution, sur de petites distances  pour ménager ma santé. Mais enfin, en prenant des précautions, ça va.
Le soleil est caché derrière les nuages. La lumière faiblit aussitôt et la température également. Je suis gelé. Je fais des aller-retour sur l'estran et je découvre deux pierres dont les formes  m'intéressent. Je les prends et m'aperçois que, collées ensemble, elle me donnent l'impression d'avoir  des sentiments de tendresse, l'une pour l'autre. Je me souviens d'avoir gardé une longueur de cordeau rouge dans  mon sac à dos et je m'en sers pour les lier comme  on  peut l'être par des sentiments. Il  me reste  à les déposer sur une roche, face  à la mer. Je m’assois et regarde, simplement. Je trouve cette scène très belle. Manque le soleil pour la lumière. Cela arrive souvent mais je lui en veux pas. Quelques minutes  plus tard,  les nuages le dévoilent et j'ai  juste le temps de réaliser quelques  photos avant qu'il ne se cache, cette fois définitivement. Je pense alors  à la tendresse des pierres et à leurs histoires que nous devrions parfois copier.

Roger Dautais



Cible
L’oiseau sauvage nous épiait, nous
qui étions deux à reconsidérer,
inertes, le chemin parcouru dans la chair.
Les villes intérieures, les bagages ficelés,
le manque de mouvement, simplement
l’idéale stupeur d’aller en reconnaissance
au fond, au tréfonds, sans qu’il soit
question d’agonie, de perte ou de noirceur
inutile.
Je procédai aux derniers préparatifs, sous
l’œil fixe de l’oiseau noir
qui vole et qui fixe, conscience exilée
toujours égale à ce que nous projetions d’être.
 
Fabrice Farre
http://www.recoursaupoeme.fr/po%C3%A8tes/fabrice-farre

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.