La vie, comme elle va

"S'il suffisait de lire comme dans une bulle de cristal, alors, ce serait, facile.Mais il faut vite déchanter, prendre la route, sac au dos et marcher, toujours marcher pour oublier ce que l'on a déjà fait, ce que l'on va faire. Il faut attendre que la nature nous prenne et nous ouvre sa voie. C'est une progression incessante, pour de si petites choses".
Roger Dautais . Septembre 2009

Un voyage étonnant au cœur du land Art

mercredi 20 août 2014

Traces Celtaoïstes : pour Paul Quéré
Karrez-aour : pour Marie-Josée Christien
Les  lumières d'Amélie : Pour Françoise Beauguion
For you, my love : pour Marie-Claude
Soleil levant à Saint-Jean : pour Youenn Gwernig
Le chant du Loc'h :  Pour Tilia
L'intime : pour  Marie-Monique (Art-Monie )

Passage : pour Anne Desocreries
Le chant de Kerpenhir :  pour Maé
Exil  ou les enfants de la peur : pour Christian Cottard
Totem  :  pour Rick Forrestal
Partition pour un chant vert :  à Guy Allix
Présences :  pour Claude Pélieu
Gouez du Levant  : pour Alain Jégou
Le trou du diable : pour Annliz Bonin
à Paul Quéré.

Kerpenhir
- Vous abandonnez cette spirale ?
Elle regarde la mer qui s’approche de cette plage de Kerpenhir  où  je viens de  tracer  une spirale.
- Vous auriez du la faire  plus haut, vers les dunes.
- Elle est bien  là.
Comment lui expliquer  à cette passante. Cette spirales est  pour Maé. Pour elle seule, partie.
La dépossession de  l’œuvre est enrichissante. Le land art  m'apprend cela tous les jours.
- A quoi cela vous avance-t-il ? La mer efface tout.
-...
Ce n'est plus une question  pour  moi, d'être en avance ou  pas dans une quelconque course, de  m'économiser  pour durer. Il me faut simplement, être sur la déferlante et prendre tous les risques d'une vie  bien remplie, jusqu'à la dernière minute. A quoi  me servirait de courir  après je ne sais quelle rédemption, puisque mon ciel est vide. Si  mon destin complique actuellement la trajectoire,  l'instinct de vie  l'emporte  provisoirement : sursitaire  jusqu'à  l'ultime.

Forêt  et baie St Jean de Crac'h

Je goûte au  parfum des bruyères en Baie de Saint Jean.  Dans cette rivière naturelle, d’indociles marais se font  piégeux comme des belles filles et les salicornes lancent des sortilèges. Les premières rousseurs palpitent au cœur des fougères. Il faudra bien qu'elles cèdent leur jeunesse, acceptent l’automne. Ensemble, le temps venu, elles ne seront plus que mémoires craquantes sous mes pas,  puis, humus, bouclant la boucle de vie.

Dolmen de Luffang

Luffang, haut  lieu de  mémoire, dolmens décoiffés. La cacophonie de vos âmes absentes, planant sur la Ria de Crac'h, ride  l'eau en surface.Un souffle sacré passe.
C'est  un  monde  oublié.
Que faire au milieu de cet oubli sinon vivre une disparition douce, une apnée éternelle,  un envol jusqu'à Kermario et ses pierres levées? Pourquoi ne pas tenter un  partage du ciel avec les oiseaux, puis se déliter en douceur  sous les  lichens d'un cromlec'h , choisir une lente dérive au jusant,  un retour  à  l'Omphalos ?

Carnac

Toute vie est kaléidoscope. Je dois, parmi ces instants vécus,  aller chercher  l'émotion au plus  près de la source, puis la transformer en cairn;
Développer, bâtir en  pierres de Carnac, face  à l'océan, partir, recommencer. Tu vois cet enfer ? Je n'ai pas d'autre solution  pour le moment. C'est assez  proche de la folie, mais sans les  murs, ce qui le rend acceptable malgré tout.

Auray

Je n'ai  pas choisi, elle ont poussé  là et je les ai cueilles, ces jolies baies rouge vif. Dans ma pratique du land art, je n'achète rien, je trouve tout dans la nature. Il n'y a pas de hasard, mais une  observation permanente de ce qui  pourrait nourrir une idée. Et c'est dans cette succession de déplacements, de non-vécu, de non-dit, de  non réponses à  mon questionnement que jaillissent des occurrences  à saisir. Cela finit par tisser la trame de ma  journée de ce que  j'appelle "  un tissu de fortune " assez fragile, sur lequel je vais trouver matière  à démarrer une nouvelle aventure land art.

Brec'h

Au  pied d'une colline boisée, je rencontre  une exceptionnelle lumière qui  me fait penser à celle du  film de J.P.Genet, Amélie Poulain. Cela me suffit pour travailler au cœur de cette émotion,  musique du film en tête, avec ces baies rouges fraîchement cueillies. Instants délicieux de solitude et de partage, dans ce  lieu sanguinaire,  où il s’agit  bien d'apaiser le tumulte des  âmes, sans les déranger. Le passage se  fait dans la délicatesse.

Carnac, le retour.

Mais le  monde est fou, se déchire, tue des enfants sans scrupule. Pour y échapper,  il faut simplement, être nés du bon côté, s'arcbouter sur son avoir, fermer les  yeux sur le drame. Assez simple, en somme.
Très rapidement, je mets en place cette scène :
Trois adultes, six enfants, face  à la mer. C'est l'exil,  l’embarquement. Je ne sais pas si cela sert de dénoncer  l'injustice de cette façon. Je ne sais pas, mais je le fais. Lampedusa existe toujours.

Roger Dautais

PS. Tous ces  lieux nommés sont dans le Golfe du  Morbihan et alentour et pour ceux qui  ne connaissent pas, en Bretagne










A Jean Bazaine,


Chambre de
combustion
solaire
                        musique
fission

Le hasard y fait
feu de toutes ses flûtes
La nécessité
bois de toutes ses cordes

Poursuite
musicale
érubescente
d’un vivant probable
Strette
d’une fugue de l’amorphe
Avant l’oreille
Avant l’œil

Avant le point
d’eutexie
de tous les sens

Ou bien encore
noctiluque ovni
au space opéra
des sphères
sonate de l’être
humain

Diastole et systole
du porphyre
au sein de la terre
Extase matérielle

Dans l’aube
cramoisie
le brasillement solaire
tango

Paul Quéré *

 * Mieux connaître Paul Quéré  :  
 http://www.unidivers.fr/paul-quere-celtaoisme-poete-breton/


***

Est-ce que les choses

réapprennent ce qu'elles sont
ou alors, est-ce toi
qui fait entrer la pierre dans la pierre
la nuit dans la nuit
et demande au  lierre
d'être sans écriture
à la mer
d'être le recommencement de la mer

Christian Viguié
Autre chose
Editions Rougerie 2010

*** 

La  lumière  pèse  à peine
ma patience du jour
accompagne l'accomplissement
des saisons

Chaque  mot levé en  moi
peu  à  peu
m'unit
au  froissement  invisible.

Marie-Josée Christien
Temps morts
Editions Sauvages 2014

mercredi 6 août 2014

Les trois sœurs de  l'eau : Pour Danièle Duteil
L'instant Zen : pour Paul Quéré
Ode  à la salamandre dorée   :  Pour Anne Lemaître
Autolyse :   Pour  Saravati

Le tambour du monde :  pour  Maïté /Aliénor

Chant d'adieu :  à Jean Clément

Fosse commune  du temps  :   Pour Christian Cottard

Flux  :   à  Camino Roque

L'appel du  large  :  pour Jacques Thomassaint

Prisme du temps : Pour Paul Quéré
Chant sacré de la Terre : pour  Helma
Le feu le sang et  l'eau  : pour Mira Kuraj
Les demoiselles de Baden :  pour  Leeloo


Les  jours sans  pain,
Je t'aime aussi.

 à Marie-Claude



La journée commence par un cri d'absence au pied du menhir. La mer s'est retirée. Même proche, elle me manque. A genoux, je gratte le sol et  le dégage à la manière d'un chat. La mémoire est toujours  une question de  lieu pour  moi. A  l'heure  ou naissent dans ma tête des idées de voyage, je suis en route et  je marche, j'approche du  lieu journalier. Celui que j'apprendrai à oublier. Le fatigue me prend dans les jambes, m'explique qu'il faut ralentir. 
Toutes cette énergie dépensée pour vivre,  à chercher, trouver, couper, cueillir, ramasser. Tout ce qu'il faut pour  inventer une forme,  un langage qui collera  à la terre, au paysage. Toutes ces installations que je recouvre parfois,  une fois terminées, par des végétaux. Ainsi la terre, comprend   mieux l'offrande, la dissout, la digère.
 Important ces grandes émotions de la rencontre avec celle qui  me recueillera  un jour.

Il  m'a dit que je bégayais ma vie, que je me répétais. Il oubliait que le jour et la nuit se répétaient aussi  jusqu'à ce que...
Je rêve de  neige, blanche comme celle qui recouvrit le corps de ma  mère défunte, pendant les semaines qui suivirent son enterrement.

Sans doute  lui ai-je dit mais je le pense toujours , sédimenter  l'instant est une gageure vouée  à  l'échec. Se vouloir  immortel a quelque chose d'indécent,  même avec  une épée au côté.Le temps doit rester libre.
Je termine  ma spirale sur la plage vide. La mer arrive. La toile se déchire. Le masque tombe et la nue vérité ne veut rien dire. La mer  reprend chaque certitude, chaque boucle de la spirale,  jusqu'à la dernière et l'avale sans concession. Ne pas attendre d'autre réponse à se festin que la satisfaction des vagues qui  ondulent de plaisir.

La ria séduit, attire, trompe aussi et qui  l'a vue grosse des eaux de  l'Atlantique la découvrira plus tard, vidée comme  un  poisson, étalée, grise. Ses  berges piégeuses et envasées dissuadent le marcheur qui ne connait pas les passages. J'aime cette association du  plein et du vide qui s'effectue parfois sous le cris des oiseaux de  mer, parfois dans  un silence étonnant.
J'ai toujours une boussole dans la poche. J'aime  l'orientation, comprendre  où je suis, imaginer la rotation de la terre, dans un endroit reculé.C'est fabuleux.

J'aime cette  impression d'être  invité au silence de la baie lorsque la mer s'est retirée. Je m'approche d'une plaque de salicornes et les  mange sur place. L'âme de la baie Saint Jean est salée. Je pense  à  mes amis acadiens rencontrés en Normandie. Ils auraient aimé ce  lieu..
Je remonte vers le nord. Une tourterelle  quitté les pins maritimes, vole au dessus des  bruyères et devient  un trait-d'union. 
Je confectionne  un bouquet de bruyères, avec application. 
Rond,  il devra être équilibré et pouvoir tenir debout,  posé  à même  le  sol. Je retrouve des gestes de fleuriste. J'apprends  à connaître cet homme lumineux que devait être Paul Quéré. Potier d'exception,  peintre,  poète. Ce sont mes premiers pas vers  lui, disparu il  y a vingt ans. Ce cairn  minuscule, ce bouquet, posés dans ce  lieu de beauté naturelle, de silence et équilibre. Dans  l'intime grandeur de la ria,  j'invoque son esprit. Il passe.

Morts, réveillez-vous, levez-vous et dansez   sous le chant du merle, du  loriot . Que vos bouches pleines de terre, accueillent l'akène,  que le chêne proclame sa vie transmise et vous, disparus, couchés sous  son  ombre, devenez sa mémoire.

Les salamandres dorées gardent les sources des sept îles. Le cercle d'or roule sur  l'horizon. Orion répond  à la nuit. Passez votre chemin,  incrédules, mes pas résonneront longtemps encore sur la route qui mène  au tombolo.Mané er Hroec, Mane Rutal, Mané Lud, soyez les grands témoins de  mon engagement, dans vos silences de Dolmen. Le tambour du  monde bat la chamade au creux du Loc'h. Sang versé et cris, flétrissures du temps  ont donné de bien beaux chênes bicentenaires.
Le feu  le sang et  l'eau se marient dans l'abreuvoir et  mon dos  courbé prend  l'averse. L'usure a du bon qui nous apprend  notre  propre finitude
Non  loin de  là, les zézés font chauffer les cartes bleues et se remplissent la panse dans les rues bondées de Carnac et de la Trinité..

La terre est dégagée, noire, tiède. Je peux  maintenant commencer  ma prochaine installation en offrande  à la terre-mère avant de reprendre la route vers celle que  j'aime.

Roger Dautais.



L'
intérieur de votre tête
n'est pas cette
masse
grise et blanche
que l'on vous a dite

c'est un
paysage
de sources et de branches
une
maison de feu

mieux encore
la
ville miraculeuse
qu'il vous plaira
d'
inventer.



Paul Nougé

 http://www.universalis.fr/encyclopedie/paul-nouge/

 http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Noug%C3%A9

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Landartiste, photographe, auteur de livres pour enfants, Roger Dautais est aussi un artiste atypique, sensible et attachant.Il a sû, dans la diversité de ses expressions, trouver une harmonie par la pratique quotidienne de cet art éphémère : le Land Art. Il dit "y puiser forces et ressources qui lui permettent, également, depuis de nombreuses années, d'intervenir auprès de personnes en grande difficulté ( Centre de détention pour longues peines et personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer) pour les aider par la médiation de l'art.